Jusqu’à peu, indépendance et chômage ne faisaient pas bon ménage.
Les indépendants n’avaient pour la plupart aucun droit à une indemnité en cas d’arrêt de leur activité.
Pendant sa campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait promis de faire évoluer la loi sur le sujet.
C’est dans ce contexte qu’a été introduit l’article 51 de la loi Avenir professionnel (loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel), qui donne la possibilité aux indépendants et aux freelances d’obtenir une indemnisation en cas de perte d’activité.
Mais qu’en est-il réellement ? Est-ce qu’un indépendant a désormais droit au chômage ? Si oui, dans quelles conditions ? Pour quel montant ?
Depuis le 1er novembre 2019, les indépendants sont désormais éligibles à une allocation-chômage spécifique, dite Allocation des travailleurs indépendants (ATI).
Cette allocation est accessible à tous les indépendants, quel que soit leur statut juridique (auto-entrepreneur, SASU, entreprise individuelle, etc.)
Son montant ?
26,30€ par jour pendant 182 jours. Cela représente environ 800€ par mois et un peu moins de 5000€ au total.
Ce n’est donc pas une allocation-chômage au sens traditionnel du terme car elle n’est pas proportionnelle aux revenus générés avant la cessation d’activité.
Elle diffère également du chômage des salariés par sa faible durée : l’ATI est versée pendant six mois au maximum quand un salarié peut toucher jusqu’à 2 ans de chômage en cas de perte de son emploi.
C’est donc un début d’aide plus qu’une véritable allocation-chômage.
Pour bénéficier de l’Allocation des Travailleurs Indépendants, un indépendant doit remplir l’ensemble des conditions suivantes :
La loi précise également que certaines catégories de travailleurs indépendants sont exclues du dispositif :
Les conditions pour qu’un indépendant puisse effectivement toucher l’ATI sont donc plutôt restrictives. Penchons-nous maintenant sur ses limites.
En avril 2021, l’Assemblée nationale a publié un premier rapport sur les résultats de l’ATI. 16 mois après son entrée en vigueur, elle n’a été versée qu’à 911 bénéficiaires. Initialement, l’Etat avait anticipé 29 300 bénéficiaires annuels.
Capture d'écran du rapport d'information de l'Assemblée nationale
Pourquoi des résultats si limités ?
Parce qu’en réalité, les conditions pour toucher l’Allocation des travailleurs indépendants sont extrêmement restrictives.
Voici quelques exemples de situations non couvertes par l’ATI :
En attendant de nouvelles évolutions de la loi, il reste donc difficile pour un indépendant de toucher un vrai chômage. Mais, il existe des alternatives. Voyons lesquelles ensemble.
Il existe d’autres outils à la disposition des freelances et des indépendants pour bénéficier d’aides ou tout au moins d’un complément de revenu en cas de cessation d’activité.
Mais quels sont-ils ? Quelle est leur efficacité ?
En tant que freelance, il existe un statut qui permet de toucher un vrai chômage : le portage salarial.
En portage salarial, un indépendant s’adjoint l’aide d’une société de portage salarial. Celle-ci a pour rôle d’encaisser le chiffre d’affaires du freelance et de lui reverser sous forme de salaire.
Au passage, la société de portage salarial règle les cotisations sociales du freelance à l’Urssaf, ce qui lui ouvre les mêmes droits sociaux qu’un salarié classique : protection santé, retraite… Et chômage !
En cas de cessation d’activité, le salarié porté peut alors demander une rupture conventionnelle à sa société de portage et bénéficier des mêmes allocations-chômage qu’un salarié classique.
Cela implique toutefois pour un indépendant d’avoir anticipé le risque de cessation d’activité et d’être passé par le portage suffisamment en amont.
Il existe également la possibilité pour les indépendants de souscrire à une assurance chômage privée.
Ces assurances ont plusieurs avantages significatifs par rapport à l’ATI :
Mais elles impliquent des cotisations supplémentaires et imposent également leurs propres conditions pour bénéficier du versement des aides en cas d’arrêt de son activité. Il faut donc bien étudier les détails des contrats en amont.
Enfin, il est toujours possible d’investir dans des placements pour se créer un complément de revenus ou une épargne en cas d’imprévu.
Vous pouvez par exemple envisager un investissement locatif ou placer de l’argent dans des placements bancaires classiques. L’investissement locatif sera particulièrement indiqué si vous disposez déjà d’économies suffisantes pour constituer un apport et ainsi convaincre un banquier de vous accompagner. Si vous n’avez pas cette possibilité, alors les placements classiques pourront constituer une alternative intéressante. Veillez bien toutefois à choisir des placements qui vous permettent de récupérer votre argent simplement en cas de besoin.
Vous ne bénéficierez alors pas d’un chômage au sens classique du terme, mais vous bénéficierez au moins un complément de revenu si vous avez investi dans l’immobilier ou d’une petite épargne si vous avez investi dans d’autres placements.
L’introduction de l’Allocation des Travailleurs Indépendants a suscité beaucoup d’intérêt lors de son introduction. Mais du fait de ses conditions d’accès restrictives et de son faible montant, elle ne constitue pas pour les indépendants une aide sur laquelle les indépendants peuvent compter en cas de chômage.
Il reste donc recommandé pour tous les freelances d’anticiper les périodes de chômage en choisissant un statut qui ouvre le droit au chômage, en investissant dans une assurance privée ou en se constituant une épargne.