La majorité des moments forts et des mutations de nos sociétés sont caractérisés par des ruptures. Et si la génération Millennials était celle qui allait mettre un terme aux organisations du travail du passé pour créer de nouveaux modèles ?
L’élan de ces mutations est à la fois la cause et la conséquence d’une nouvelle prise de conscience chez les nouvelles générations qui consiste à reprendre le contrôle de sa vie professionnelle. Avec la démocratisation des plateformes et des communautés de freelances, c’est une nouvelle donne qui s’offre à cette population d’experts.
Cette nouvelle génération, c’est celle qui souhaite reprendre le contrôle et décider de quoi demain sera fait. C’est celle qui souhaite être indépendante, choisir avec qui collaborer et à quel prix. Cette nouvelle vague de travailleurs annoncerait-elle la fin de la culture de l’exploitation présente au sein des agences et des ESN (ex-SSII) ? Le point de rupture semble avoir été atteint. C’est tout un système qui voit son organisation se transformer.
Si jadis les freelances étaient en marge de la population des travailleurs actifs, ils sont aujourd’hui au premier rang des mutations du monde du travail. Et l’avenir semble leur sourire, car être freelance aujourd’hui, c’est également la possibilité de bénéficier d’avantages au quotidien au sein de communautés bienveillantes. Les plateformes qui accompagnent les freelances participent au développement de ces communautés. Elles apportent un produit complet qui comprend assistance administrative, services professionnels et réseau d’affaires. Ces initiatives en faveur des freelances viennent apporter un nouveau souffle à cette population désormais au sommet de la vague qui déferle sur le marché de l’emploi.
Mais s’ils sont indépendants, ils sont par ailleurs de moins en moins à travailler seuls. Les freelances se regroupent progressivement en très petits groupes. Ils forment ainsi une parfaite combinaison de compétences qui se complètent pour évoluer avec une agilité imbattable. Serait-ce la fin du cliché du freelance indépendant et solitaire ?
Aristote nous dirait ici que tout cela est bien logique puisque le propre de l’homme est de vivre en communauté pour s’accomplir. Mais d’autres aspects viennent en jeu, car évoluer en petit groupe d’experts permet d’accéder à des projets de plus grande envergure, et donc d’être gagnant sur le plan financier.
La technologie change la manière dont les travailleurs gèrent leur carrière professionnelle, mais change surtout la manière dont les entreprises accèdent aux talents. Car du côté de l’entreprise, le besoin d’experts s’intensifie drastiquement. On assiste depuis quelques temps à une pénurie de talents sur le marché du travail, en particulier dans les domaines du digital.
La réalité, c’est que conscient de leur potentiel et de leur valeur sur le marché, les talents sont de plus en plus à évoluer en freelance et à écarter de leur chemin la voie du CDI. Le point culminant du salariat semble avoir été franchi. Le mouvement des indépendants bouscule alors la donne, mais apporte par ailleurs son lot de solutions. Car pour l’entreprise, cette plateformisation de l’accès aux talents est une opportunité de devenir plus rapide, plus agile, plus efficace. Des canaux uniques qui donnent accès à la bonne compétence, au bon moment, pour répondre à tout type de demande et faire face aux pics d’activité.
Face à ces mutations du marché et pour rester compétitives, les entreprises se doivent désormais de développer un écosystème de talents qui s’étend au-delà de leur organisation interne. Le modèle classique de recrutement s’érode petit à petit.
Aujourd’hui c’est chaque strate de l’entreprise qui se remet en cause pour s’adapter à ces mutations. Si hier la direction des achats venait « acheter » des compétences, comme on achète un lot de fournitures, il faut aujourd’hui penser le phénomène de cloud humain avec une vision long terme de la mutation de l’entreprise et intégrer la gestion des freelances au premier plan des préoccupations de l’entreprise. Ne pas s’adapter à ces nouveaux paradigmes peut être lourd de conséquence sur le long terme.
Le futur du travail se dessine aujourd’hui, au fur et à mesure que la plateformisation de nos ressources s’organise, et qu’évoluent les aspirations professionnelles et personnelles des nouvelles générations. Mais cette nouvelle donne apporte son lot de challenges pour chaque pays du globe qui connait ces mutations.
Car le futur des plateformes nous appelle aussi à penser de nouveaux modèles sociaux, avec une protection sociale adaptée aux nouvelles formes de travail, tout comme de nouveaux appareils administratifs, qui pour l’heure sont identifiés par les freelances comme un frein majeur, tant le système est imparfait et à des années lumières des usages de cette génération digitale.
Chaque pays évoluant sur ce plan à sa propre vitesse, il n’est d’ailleurs pas impossible que certains freelances s’installent ailleurs pour bénéficier d’avantages non négligeables. Depuis quelques années, l’Estonie propose par exemple un statut de « e-résident » afin d’attirer les entrepreneurs et les freelances qui souhaitent créer une leur structure dans un environnement fiscalement avantageux, où toute la gestion administrative peut se faire en ligne, depuis n’importe où dans le monde. Il n’est donc pas impossible que des modèles sociaux innovants face leur apparition en terre estonienne d’ici quelques années pour séduire les dizaines de millions de freelances en activité aujourd’hui dans le monde.
A moins que la France de Macron ne tire en premier ? Selon l’IFOP, 50% des Français sont aujourd’hui prêts à tenter l’aventure de l’indépendance. Une place de champion européen reste encore à prendre sur le podium des mutations du travail…